Syndicat Force Ouvrière du Casino Enghien

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Dossier sur la légalisation des casinos sur Internet et ses risques !

 

CASINOS SUR INTERNET : VERS UNE LÉGALISATION EN 2009 ?

 

Le gouvernement envisage d'autoriser les jeux en ligne dès l'année prochaine. Une mesure dangereuse en termes de santé publique comme d'emplois et qui aiguise bien des appétits.

Le vendredi 6 juin dernier, depuis le très chic complexe de tennis de Rolland Garros, le ministre du Budget Eric Woerth annonçait une petite révolution : en 2009, la France allait légaliser les jeux et les paris sur internet. Concrètement, il sera possible, à partir de la fin 2009, de parier sur des rencontres sportives, des courses hippiques et de jouer au casino depuis son ordinateur.

Voilà déjà plusieurs mois que la Française des Jeux et le PMU proposaient sur leur site web respectif cette possibilité au grand dam des opérateurs de jeu sur internet. Constitué principalement des bookmakers anglais, ceux-ci ont en effet décidé de s'attaquer au marché français et au monopole du jeu en ligne détenu par les deux sociétés françaises. Il a donc saisi la Commission Européenne qui a multiplié les pressions pour que la France ouvre le secteur des jeux à la concurrence, alors que la législation française actuelle interdit de fait l'entrée sur le marché d'entreprises étrangères. Le commissaire européen au Marché intérieur, Charlie McCreevy avait même été jusqu'à menacer de porter l'affaire devant la Cour de justice des communautés européennes.

Mais le gouvernement n'a pas toujours été si attentionné à l'égard des instances européennes et, quelques mois avant, il affirmait même le caractère illégal du jeu en ligne. Ainsi, la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a renforcé les sanctions pour quiconque ferait de la publicité en faveur des jeux à distance. Reprenant une disposition radicale en vigueur aux Etats-Unis, elle a également donné aux pouvoirs publics la possibilité de bloquer tout mouvement ou transfert de fonds en provenance des sites internet qui organisent des activités de jeux prohibés.

Et afin de joindre le geste à la parole, les services du ministère de l'Intérieur avaient même enclenché une procédure contre le groupe Partouche qui narguait l'Etat en prêtant son nom à un site de poker en ligne domicilié à l'étranger. Résultat : le tribunal Correctionnel de Nanterre a, le 16 mars 2007, condamné Patrick Partouche, le dirigeant du groupe éponyme, à un an de prison avec sursis et 40 000 euros d'amende après que la Procureur eût notamment insisté sur la «volonté délibérée de contourner la législation française en s'adressant à une société basée dans un paradis fiscal».

 

Revirement. La conférence de presse du ministre du Budget vient officialiser un virage à 180 degrés de l'approche gouvernementale. Mieux encore, Eric Woerth annonce également que la légalisation des jeux sur internet s'appliquera aussi au secteur des casinos alors que celui-ci n'était pas concerné par la colère de la Commission Européenne puisque l'interdiction ne souffre aucune exception. En fait, l'annonce de la légalisation des casinos en ligne est le fruit d'un remarquable travail de lobbying tous azimuts menés par les syndicats patronaux de la branche des mois durant. Comme tout travail de lobbying, il s'est mené en coulisses, dans la discrétion voire le secret et sa réussite se mesure à l'aune des résultats obtenus : en un an, une activité jugée criminelle que l'Etat entendait combattre est subitement devenue légale et respectable…

Pourtant, les raisons d'être sceptique voire opposé au jeu sur internet et aux casinos en ligne ne manquent pas. "l'offre de jeux sur internet constitue le support de nouvelles formes de criminalité et un important vecteur de blanchiment d'argent" s'exclamait ainsi le Président et Rapporteur de la Commission des lois lors du débat parlementaire qui a précédé l'adoption de la loi relative à la prévention de la délinquance. Un constat que les Etats-Unis, pays réputé peu hostile au jeu et aux casinos, ont déjà effectué depuis longtemps et qui les a amenés à interdire tous les casinos en ligne dès 2006. Il faut dire qu'une commission d'enquête parlementaire avait préalablement relevé que 90% des sites de casinos sur internet appartiennent en réalité aux différentes mafias nationales.

Blanchiment. Dans de telles conditions, autoriser cette activité constituerait pour ces dernières une formidable opportunité de légaliser leur commerce aujourd'hui interdit, de blanchir les revenus de différents trafics et de générer de nouveaux profits. Ainsi que le constate le criminologue Alain Bauer chargé en 2007 par le gouvernement de la rédaction d'un rapport joliment nommé Jeux en ligne et menaces criminelles, «Depuis l'apparition des premiers casinos en ligne, les organisations criminelles ont rivalisé d'ingéniosité pour développer à une échelle industrielle des systèmes de fraude complexe destinés à atteindre deux objectifs principaux : le blanchiment d'argent et la manipulation des jeux pour pirater les comptes bancaires des internautes.»

En clair, celui qui donne son numéro de carte bancaire à un casino en ligne ne doit pas s'étonner si, quelques mois plus tard, son compte est débité de quelques milliers d'euros à l'autre bout du monde. Du reste, les préoccupations liées à la criminalité ne sont pas les seules à préoccuper les pouvoirs publics et les risques en termes de santé publique sont en effet aussi considérables eu égard au phénomène de dépendance.

Car le jeu est et reste une drogue dans la mesure où il procure un plaisir fort et suscite une addiction assez forte. Comme pour n'importe quelle drogue, c'est la question du dosage qui va permettre de déterminer s'il y a, ou pas, dépendance et il est d'autant plus difficile de s'arrêter de jouer que l'on en tire du plaisir. Avec plus ou moins d'hypocrisie (car le jeu est une source importante de recettes fiscales), l'Etat proscrit l'accès aux casinos aux mineurs et aux personnes ayant demandé à être interdites d'entrée. Or, l'éventuelle légalisation des casinos sur internet offrira aux mineurs et aux interdits de jeu la possibilité de jouer en toute tranquillité 24h sur 24 sans réelle procédure de contrôle de l'identité.

Autre spécificité d'internet : l'argent y est dématérialisé ce qui augmente la perte de repères. L'argent n'est plus qu'un nombre de crédits dont la perte est quasi-indolore sur le moment et la dématérialisation renforce la dépendance. Résultat, le risque de voir les économies du joueur englouties en un rien de temps est démultiplié avec internet.

Enfin, la question cruciale du contrôle des pouvoirs publics sur les casinos virtuels est naturellement posée. Aujourd'hui, des fonctionnaires de police spécialisés veillent à ce que les casinos respectent les textes juridiques qui réglementent les jeux. Il s'agit, par exemple, de vérifier qu'une machine à sous redistribue bien 90% des sommes qu'elle reçoit, qu'il y a bien 52 cartes dans un jeu, ou que l'actionnariat d'un casino n'abrite pas de mafieux.

Mais sur internet, quel contrôle ? Comment fera la police des  Jeux pour contrôler un casino en ligne qui se résumera à un simple logiciel tournant sur un rdinateur fonctionnant dans un local quelque part en Asie et appartenant à une société domiciliée dans un paradis fiscal ?

 

Menaces sur l'emploi. A cela s'ajoutent les conséquences sociales qui découleraient d'une éventuelle légalisation des casinos en ligne. La France compte aujourd'hui 196 casinos -soit la plus forte proportion par habitant de toute la planète- avec une concentration dans les régions littorales. Inutile d'être agrégé de sciences économiques pour comprendre que l'émergence d'une offre de jeu légale sur internet aura pour conséquence de vider les casinos «en dur» d'une bonne partie de leur clientèle et du chiffre d'affaires qui va avec. Il existe en effet une clientèle qui fréquente régulièrement les casinos par goût pour le jeu et qui serait immédiatement attirée par une offre de jeu légale sur internet. Quelle serait l'ampleur de la baisse ?

Approximativement, un tiers de la clientèle actuelle selon les spécialistes du secteur. Une véritable saignée qui se traduirait par de fortes réductions d'effectifs au sein des 17 000 salariés que compte la branche et ce aussi bien pour les emplois qui relèvent du jeu à proprement parler que pour les emplois des activités annexes telles que les hôtels et les restaurants.

Enfin, les pourboires laissés par les clients constituant une part majeure des salaires, une baisse de fréquentation se traduirait par une diminution des pourboires donc de leur revenu. L'inquiétude est donc de plus en plus palpable chez de nombreux employés et Force Ouvrière a écrit aux Ministères de l'Intérieur et du Budget pour leur demander «au vu de la gravité de la situation économique, de surseoir à la légalisation des casinos sur internet» et une délégation sera reçue à Bercy et Place Beauvau dans les premiers jours de janvier.

 


Cher camarade,

1) Rendez-vous au Ministère du Budget à propos du projet de légalisation des casinos sur internet :

FO Casinos a été reçue ce mercredi 07 janvier au Ministère du Budget par Mr PROTO, Directeur Adjoint de Cabinet du Ministre du Budget, Eric WOERTH (la délégation FO était composée d'Hervé HOBBE et de David ROUSSET).

Cette rencontre découle d'un courrier adressé en novembre dernier au Ministre du Budget dans lequel FO Casinos s'inquiète de la volonté du gouvernement de légaliser les casinos sur internet.

En introduction, Mr PROTO explique que le secteur des casinos connaît actuellement une crise dont on ne sait s'il est temporaire ou durable. Il observe que, même lors de la crise économique de 1992/93, le PBJ continuait à progresser ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. C'est donc pour aider les casinotiers que le gouvernement a récemment décidé de leur accorder des facilités fiscales et réglementaires. Par ailleurs, le gouvernement estime que la future légalisation des casinos sur internet constituera un « relais de croissance » (c'est-à-dire de nouveaux bénéfices) pour les casinos.

Pour notre part, nous faisons observer que :

- la crise actuelle est avant tout le produit de la baisse de la fréquentation car même la clientèle des casinos est confrontée aux difficultés de pouvoir d'achat. Du reste, la situation n'est pas si grave que les casinotiers le disent puisque le PBJ n'a baissé que de 8,5% et pas de 20 ou 30% comme le prédisaient les patrons. Ce n'est donc pas par hasard s'il n'y a à ce jour aucun casinotier qui est déficitaire…

- Si le PBJ a continué de croître durant la crise économique de 1992/93, c'est parce que la crise économique était moins grave qu'aujourd'hui et que la politique d'implantation de MAS et de nouveaux casinos battait son plein.

- Les aides fiscales accordées aux casinotiers par le Ministère du Budget vont permettre aux patrons de renforcer leurs bénéfices mais ne résoudront pas la baisse de la fréquentation. Elles ne résoudront donc pas la tendance.

- Or, l'éventuelle légalisation des casinos sur internet se traduirait par une diminution de 25 à 33% de la clientèle ce qui sera un choc bien plus grave que les 8,5% de 2008. Plus l'offre de jeux sur internet sera vaste et plus les clients seront tentés d'aller sur le net et plus dans les casinos en dur.

A ce sujet, Mr PROTO nous précise que le projet de loi relatif à la légalisation des casinos sur internet est presque fini de rédiger avant d'être présenté en Conseil des Ministres d'ici fin janvier et soumis au Parlement au printemps. En vue d'une mise en place effective fin 2009, début 2010, celui-ci créera une autorité de régulation qui aura pour mission de fixer le cahier des charges auquel seront soumis les candidats. Il y aura ainsi 3 types de licences différentes (une pour les paris sportifs, une pour les courses de chevaux et une pour les casinos). Ces licences seront gratuites et ne seront pas limitées en nombre. Pour ce qui est de l'offre de jeux de casinos, l'option retenue pour le moment est de ne proposer que le poker et de ne pas inclure les jeux traditionnels et les MAS même si ce choix n'est pas encore définitif car les casinotier aimeraient y ajouter les jeux traditionnels.

A ce sujet, nous précisons que nous sommes totalement opposés à l'arrivée des JT et des MAS (moins il y aura de jeux disponibles sur internet, moins le nombre de clients susceptibles d'aller sur internet sera important). Nous invitons donc le gouvernement à ne pas céder au lobbying des casinotiers. Nous rappelons que nous sommes fondamentalement sur la même position que l'était le gouvernement en 2007 qui considérait, à l'époque, que les casinos sur internet constituaient la porte ouverte au blanchiment et à l'addiction. Enfin, nous précisons que la légalisation des casinos sur internet se traduira également par une perte de recettes pour les communes qui possèdent aujourd'hui un casino.

Sur ce point, Mr PROTO reconnaît que de nombreux élus sont inquiets et qu'il va s'efforcer de les recevoir pour essayer de les rassurer.

Pour finir, nous demandons s'il est possible d'avoir connaissance du projet de loi une fois que les derniers arbitrages auront été faits et Mr PROTO s'engage à nous faire parvenir le texte au moment de sa présentation en Conseil des Ministres.


2) Rendez-vous au Ministère de l'Intérieur à propos des futures modifications à la réglementation des jeux :

Dans la foulée du rendez-vous au Ministère du Budget, nous nous sommes rendus au Ministère de l'Intérieur où nous avons été reçus par Mr PEYVEL, membre du Cabinet de Mme Alliot-Marie en charge des casinos.

En introduction, nous avons précisé que l'actuelle réglementation des jeux a déjà été modifiée en 2007. A l'époque, le projet d'arrêté Sarkozy avait soulevé une grande inquiétude chez les employés car il prévoyait initialement :

  • - la fermeture des salles de JT à des heures différentes de la fermeture des casinos
  • - une généralisation de la polyvalence
  • - le remplacement progressif des JT par leur version électronique

Suite à la grève du 31 décembre 2006, une concertation avec le Ministère avait entraîné le retrait de ces dispositions et un point d'équilibre entre les exigences patronales et les revendications des employés avait été trouvé. Or, les casinotiers cherchent aujourd'hui à briser ce statu quo en réintroduisant ces mesures inadmissibles. Nous avons donc rappelé au Ministère notre opposition absolue à ces mesures et l'avons mis en garde contre les réactions que ne manquerait pas d'entraîner le retour de ces mesures.

Mr PEYVEL nous a répondu qu'il avait en effet été sollicité par les patrons de casinos et par la CFDT, la CGC et la CFTC sur plusieurs points dont:

  • - la possibilité de fermer les JT avant la fermeture du casino
  • - l'autorisation de n'exploiter les casinos que de façon saisonnière


Mr PEYVEL nous a également informés d'un projet permettant aux casinotiers d'obtenir plus facilement des MAS. Il s'agirait de définir un nombre maximal de MAS par casino qui serait fonction du nombre de tables de JT (50 MAS pour 1 table et 25 MAS par table supplémentaire).

Nous avons attiré l'attention de Mr PEYVEL sur la complexité de ce dispositif. S'agit-il en effet des tables de JT exploités réellement ou théoriquement. On sait en effet que beaucoup de casinos sont censés exploiter des tables de jeux mais ne les ouvrent pas faute d'embaucher suffisamment de personnel. Sur ce point, Mr PEYVEL a reconnu les difficultés pratiques et nous a précisé que le décompte des tables se ferait de façon hebdomadaire avec modulation ce qui ne nous a pas empêchés de rester sceptiques.

A propos d'un éventuel retour à la saisonnalité, Mr PEYVEL nous a indiqué que le Ministère n'entendait pas s'impliquer sur cette question qui ne concerne que les casinotiers et les communes avec lesquelles ils négociant les cahiers des charges. Naturellement, nous lui avons indiqué notre opposition totale à une telle mesure qui n'existe plus depuis que les MAS ont été introduites en France.

Enfin, Mr PEYVEL a reconnu que les casinotiers réclamaient fortement la généralisation de la polyvalence. Nous lui avons donc rappelé que, en 2007, le Ministère avait renvoyé cette question à une négociation de branche avant toute modification de la réglementation. Or, cette négociation n'a pas abouti car les employeurs parient sur l'aide du Ministère pour autoriser la polyvalence tous azimuts. Nous avons donc invité le Ministère à rester sur la position qui était la sienne en 2007 et à attendre que les partenaires sociaux se soient préalablement mis d'accord. Pour FO, la polyvalence est avant tout un sujet d'ordre social et ce domaine ne relève pas du Ministère de l'Intérieur mais du dialogue social. Par ailleurs, nous demeurons hostiles à la généralisation de la polyvalence qui permettrait aux employeurs de réduire le nombre d'employés et de dégrader d'avantage les conditions de travail.

CONCLUSION :
Ces deux rendez-vous nous ont permis de connaître les grandes lignes des modifications envisagées que ce soit à propos de la légalisation des casinos sur internet ou de la Réglementation des Jeux. Ils ont aussi été l'occasion de faire entendre la position de FO, seule organisation syndicale à avoir sollicité les pouvoirs publics sur ces sujets cruciaux. Concrètement, il importe de maintenir la pression la plus grande possible pour faire échouer le lobbying des casinotiers qui veulent délocaliser l'activité JT sur internet et réduire le nombre d'employés. Les semaines qui viennent vont donc être déterminantes pour faire privilégier l'intérêt des employés sur celui des patrons et nous devrons chercher à mobiliser les employés autour de la défense de la profession.

Il se trouve que les confédérations syndicales ont appelé à une journée de grève et de manifestations le 29 janvier prochain sur la question de l'emploi et du pouvoir d'achat. Il importe donc que cette date trouve un écho auprès des employés de casinos. Un mot d'ordre de grève ayant été déposé, tout salarié gréviste ce jour-là sera couvert juridiquement sans avoir à en informer son employeur et il va de soi que chaque militant FO doit faire grève ce jour-là. Tant les casinotiers que les pouvoirs publics regarderont précisément l'ampleur qu'aura le 29 dans les entreprises. A nous de jouer !

 



26/03/2009
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